Analyse des Marchés | n°3 | 2024
Vous pouvez découvrir notre Analyse des Marchés. Un document réalisé par nos conseillers en placement avec quatre sujets : retour sur les marchés, la vision pour la suite, la thématique choisie, nos experts vous répondent. Différents sujets mis sous la loupe de nos experts avec leurs visions de l’actualité et de l’économie.
Tous les trois mois, vous retrouverez sous format pdf dans votre boîte email ou sur notre site l’Analyse des Marchés de la BCJ.
Yvan Petignat, Conseiller en placement
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Nos experts vous répondent
Dans ce numéro, notre expert Yvan Petignat, conseiller en placement, traite de l'endettement.
Vous aimeriez que nos experts traitent une thématique qui vous intéresse ? N’hésitez pas à nous écrire et à nous la proposer pour notre prochain numéro trimestriel.
Contact : marches@bcj.ch
Quel peut être l’impact sur la dette des pays européens de la poussée de l’extrême droite en Europe ?
L’instabilité politique causée par la montée de l’extrême droite en Europe pourrait entraîner des fluctuations sur les marchés financiers et nuire à la confiance des investisseurs, ce qui pourrait rendre plus coûteux le financement de la dette. Les dernières élections européennes ont confirmé une droitisation de plusieurs pays. Néanmoins, ces élections ont attesté la position politique globalement majoritaire du centre droit au Parlement européen, véhiculant en surface un message de continuité politique au niveau de l’Union européenne (UE).
Cela dit, il convient de souligner que l’architecture économique et financière de la zone euro est très différente aujourd’hui de ce qu’elle était lors de la crise de la dette souveraine de 2012. L’existence d’outils mis en œuvre par la Banque centrale européenne (BCE), tel que l’instrument de protection de la transmission (IPT), limite les possibilités de ventes massives désordonnées sur le marché des taux, tout en incitant clairement les gouvernements à se conformer au cadre budgétaire de l’UE. Une condition essentielle exigée par la BCE pour l’activation de l’IPT est la volonté d’un gouvernement de se conformer aux règles budgétaires de l’UE.
Est-ce que la dégradation de la note de crédit de la France par Standard & Poor’s (S&P) a des conséquences sur son refinancement ?
L’abaissement de la note de crédit aura une conséquence immé- diate en renchérissant quelque peu l’écart de taux par rapport au Bund allemand et donc les conditions de refinancement de la dette publique émise par le pays sur les marchés financiers. Mais avec un double A même suivi d’un moins, la capacité de la France à honorer les échéances de sa dette reste très forte selon les critères de l’agence de notation. Le plus important pour les investisseurs reste l’évolution à long terme de l’économie fran- çaise et notamment la capacité du pays à améliorer sa croissance économique potentielle.
Néanmoins, les résultats des élections législatives françaises pourraient avoir un impact plus important que la rétrogradation de S&P. En effet, les engagements de réduction des déficits pris par l’ancienne majorité seront mis à mal par un parlement où la gauche pourrait être majoritaire même si elle reste relative. En l’absence d’une majorité claire, une période d’instabilité s’installe avec des blocs politiques qui n’ont pas l’habitude de rechercher le consensus. Aucune réforme d’envergure ne devrait voir le jour ces 3 prochaines années, ce qui signifie que les autres agences de notation vont rapidement revoir à la baisse leurs estimations sur l’Hexagone.
Est-ce que la BCE est encore capable de sauver tout un continent ?
Comme elle l’avait fait en 2012, la BCE ne restera pas inactive si une nouvelle crise de la dette fait son retour. En effet, le «quoi qu’il en coûte» de Mario Draghi (ancien président de la BCE) est toujours d’actualité. La BCE a créé un indicateur de stress financier dans la foulée de la crise grecque qui repose sur une quinzaine d’indicateurs de marché (comme les taux de change, les taux de crédit ou les spreads). Il permet de savoir si la politique monétaire se transmet efficacement au reste de l’économie, en particulier à la fois au centre et à la périphérie de la zone euro.
Il semble donc que la BCE soit mieux armée qu’en 2012 pour lutter contre une crise éventuelle. Par ailleurs, la commission européenne continue sa surveillance des finances des Etats et les sanctions peuvent être lourdes. Dernièrement, elle a annoncé la mise sous procédure pour déficit excessif de 7 pays de la zone euro qui ne respectent pas les règles budgétaires de l’Union européenne (amende équivalente à 0.1% du PIB).
Quel impact sur mes placements en tant qu’investisseur suisse ?
La Suisse n’est concernée qu’indirectement par une instabilité européenne. En effet, une Europe en difficulté aura un impact sur le franc suisse, considéré depuis longtemps comme une valeur refuge. Une crise européenne pourrait accélérer l’appréciation du CHF comme nous l’avons connue au début des années 2010 avec la crise de la dette souveraine européenne. A cette époque, il a fallu une politique très agressive de la BNS pour essayer de limiter cette appréciation. Néanmoins, les résultats des élections européennes et législatives françaises n’ont pas eu d’impact majeur sur le cours EUR/CHF. La BNS reste très attentive à l’évolution du CHF afin de protéger notre industrie exportatrice. Les baisses de taux de ces derniers mois vont dans ce sens et il est à prévoir que notre banque nationale restera vigilante.