3'000 arbres plantés par la BCJ
Dans un contexte de changement climatique et de hausse des phénomènes extrêmes tels que les périodes de sécheresse, vagues de chaleur ou tempêtes, nos forêts subissent de nombreux dégâts et vont connaître de profondes mutations.
Dans le canton du Jura, la forêt représente 46% de notre territoire, soit près de 37'000 ha.
Afin de permettre à ses clients de faire un geste durable pour la forêt jurassienne, la BCJ a lancé en 2021 un partenariat avec DB Forêt et Jardin. Depuis le début de ce projet, 3'000 arbres ont été plantés. Les plantations sont effectuées dans des zones de monocultures d'épicéas sinistrées par le bostryche et de hêtres touchés par le sec.
Mais comment se porte la forêt jurassienne ? Quels sont les défis à venir ? Quelles essences privilégiées ? Pour répondre à ces questions, mais également sensibiliser sur l’importance de la forêt et de ses nombreuses fonctions, Marcel Mahon, collaborateur à l’Office de l’environnement du canton du Jura, nous livre son éclairage.
Interview Marcel Mahon
Pouvez-vous vous présenter ? Quel est votre fonction à l’Office cantonal de l’Environnement ?
Marcel Mahon, collaborateur à l’Office de l’environnement du canton du Jura, responsable des dégâts aux forêts. Je suis l’intermédiaire entre les propriétaires de forêts représentés par les gardes forestiers, la Confédération et l’Institut fédéral de recherche forestière à Zurich, le WSL.
Quels sont les fonctions naturelles que remplit une forêt et qui sont indispensables aux êtres humains ?
La forêt est un riche écosystème apportant de nombreuses prestations à la société. Au-delà de la production de bois, de baies et de champignons, la forêt agit pour la purification de l’air et le filtrage de l’eau, mais aussi pour la rétention de CO2 et la régulation thermique. En effet, nous mesurons une diminution de 4°c à l’intérieur d’un massif forestier par rapport à un environnement sans arbres. Les forêts protègent également contre les chutes de pierres et l’érosion et sont un espace naturel de loisirs et détente. Les pâturages boisés sont également un paysage typique de notre canton, liant sylviculture, élevage et tourisme.
Pouvez-vous nous en dire plus sur le rôle de la forêt en tant que sanctuaire de la diversité biologique ?
Grâce à une gestion forestière proche de la nature, la forêt en tant que milieu, est restée en grande partie proche de l’état naturel. Les interventions en forêt qui sont pratiquées aujourd’hui ne modifient que peu la diversité naturelle, elles apportent souvent un surplus de lumière propice pour de nouvelles essences. De plus, la forêt jurassienne dispose d’un réseau d’îlots de vieux arbres, d’arbres-habitats et de réserves forestières permettant de préserver certains vieux peuplements devenus plus rares. À terme, il est prévu que 10% de la surface forestière soit dévolue à une évolution sans intervention humaine.
Comment se porte la forêt jurassienne ? Que pouvez-vous observer ?
D’une manière générale, la forêt jurassienne souffre des sécheresses à répétition et des canicules. Deux problèmes majeurs nous préoccupent : le dépérissement du hêtre, principalement en Ajoie, et les attaques du bostryche typographe aux Franches-Montagnes.
Depuis la sécheresse de 2018, de nombreux hêtres mais également d’autres essences ont séché sur pied. Les forestiers mettent en œuvre des mesures permettant de stabiliser les peuplements restants. Cette pratique reste toujours en place aujourd’hui. De nouveaux dégâts sont apparus en 2023 après une année 2022 aussi très sèche et chaude. Pour l’épicéa, les grandes surfaces très résineuses ont disparu en Ajoie et dans la Vallée. Aux Franches-Montagnes, les dégâts sont très importants par endroits. Dans ces secteurs, de grandes coupes de bois doivent être entreprises afin d’exploiter et d’évacuer les épicéas atteints par le bostryche et éviter une propagation. La régénération de ces surfaces représentera un défi dans la gestion du pâturage boisé.
Comment voyez-vous l’avenir de la forêt jurassienne et les nombreux défis qui se posent aujourd’hui ?
L’ampleur des sécheresses et températures extrêmes et leurs conséquences sont des phénomènes nouveaux. Personne, dans le milieu forestier n’aurait imaginé de telles bouleversements il y a dix ans encore. Pour l’avenir, propriétaires, Cantons et Confédération explorent les solutions possibles pour adapter nos forêts aux changements climatiques. Le défi sera de pouvoir offrir une forêt relativement sécurisée à la population et suffisamment stable pour assurer ses prestations pour la société. Le matériau-bois issu de notre région ne devra pas être oublié, il est la seule matière première renouvelable et locale de notre canton.
Nos forêts vont connaître de profondes mutations dues au réchauffement climatique. Pourquoi est-il important d’adapter la forêt jurassienne ? Quelles sont les mesures prises par l’Office cantonal de l’environnement ?
Les sylviculteurs ont favorisé auparavant un panel d’essences par des interventions ayant pour but d’avoir un produit adapté à la demande des utilisateurs du bois. Le but est désormais un peu différent ; il s’agit de favoriser les essences pouvant offrir potentiellement une résistance aux conditions météorologiques difficiles. Des méthodes favorisant des forêts moins denses et plus structurées ainsi qu’un choix d’essences adaptées aux conditions climatiques actuelles sont des mesures importantes pour l’avenir. Le soutien apporté par le biais d’aides aux soins à la jeune forêt, d’aides aux éclaircies et le plan climat cantonal, sont des mesures soutenues et reconnues par le Gouvernement.
La forêt jurassienne souffre du changement climatique mais est également partie de la solution. L’utilisation de bois pour la construction permet de séquestrer durant la vie du bâtiment le CO2 que les arbres absorbent par photosynthèse. De plus la forêt, régule le climat et protège contre les dangers naturels.
En quoi la diversification des essences est-elle importante ?
Les nombreux dégâts constatés sur le hêtre depuis 2019 nous ont fait prendre conscience qu’une diversification aurait peut-être permis d’atténuer quelque peu le choc. La modification des forêts va se produire inéluctablement. La promotion de diverses essences va cependant diluer le risque des effets du climat. Le chêne, le pin, l’alisier, le charme, le tilleul sont des essences présentant des capacités supérieures au hêtre pour affronter des climats secs et chauds. Par contre, nous remarquons tout de même aussi quelques dégâts sur ces arbres-là, notamment lorsqu’ils sont âgés ou serrés. Ainsi la sylviculture ne doit pas uniquement diversifier les essences mais également les structures, afin de permettre aux arbres de développer de belles couronnes et un système racinaire étendu.
Une autre piste explorée, sont les identités génétiques plus adaptées que pourraient présenter les essences que l’on trouve actuellement chez nous. À l’exemple du hêtre, qui manifestement n’a pas réussi à résister aux conditions estivales de 2018, il pourrait cependant, selon certains génotypes, présenter une résistance accrue au climat. Peut-être ces sujets existent chez nous, à voir si nous arriverons à les caractériser.
Vous aussi, faites un geste pour le climat et la forêt jurassienne en confiant votre projet à la BCJ.